Léo Major, un héros de guerre oublié

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L’histoire de Léo Major, un simple soldat qui a combattu les Allemands pendant la Seconde Guerre mondiale, a plus de similarités avec un scénario hollywoodien qu’avec une véritable biographie. Pourtant, ce Montréalais d’origine modeste est aussi vrai que la légende qui accompagne son nom.

Léo Major est le seul soldat canadien à avoir reçu la Médaille de conduite distinguée (DCM) à deux reprises pour sa bravoure devant l’ennemi et le seul soldat à avoir obtenu cette décoration dans deux guerres différentes. Cette décoration était la deuxième plus haute distinction de l’armée canadienne à l’époque et n’a été que très peu décernée relativement aux autres honneurs existants.

Major s’engagea dans le Régiment de la chaudière en 1940, alors qu’il était âgé de 19 ans. Dans les mois qui suivirent, son régiment traversa l’Atlantique pour préparer sa participation à la guerre. Trois ans plus tard, le 6 juin 1944, il fut l’un des soldats qui survécut au débarquement de Normandie.

Bien qu’ils eussent trompé la mort sur les plages normandes, les soldats Alliés n’étaient jamais en sécurité et Léo Major l’apprit à ses dépens. Dans les jours qui suivirent le débarquement, une grenade le blessa au visage, ce qui lui fit perdre partiellement l’usage de son œil gauche.

Malgré ce handicap, le soldat insista pour retourner au front, arguant qu’il n’avait besoin que d’un œil pour viser avec sa carabine. Le Québécois réintégra bientôt les rangs, muni d’un cache-œil qu’il porta jusqu’à la fin de la guerre.

Comble du malheur: vers la fin de février 1945, le véhicule qui le transportait vers la Rhénanie sauta sur une mine, tuant tous les autres occupants sur le coup et le blessant au dos en plus de lui fracturer les deux chevilles. Il insista une fois de plus pour retourner au combat avant même d’être pleinement rétabli.

À son arrivée aux portes de la ville de Zwolle avec son régiment, le 12 avril 1945, Léo Major ne se doutait pas qu’il était sur le point d’accomplir un fait d’armes qui le ferait entrer dans la légende.

Mission de reconnaissance

Zwolle, une ville des Pays-Bas de 50 000 habitants, était occupée par les Allemands, qui en avaient fait un centre de transport et de ravitaillement stratégique. Les Alliés ne disposaient toutefois que de peu d’informations sur l’ennemi décidèrent donc d’envoyer des éclaireurs volontaires pour effectuer une mission de reconnaissance nocturne dans la ville.

«Lorsque j’ai constaté que personne ne se portait volontaire, j’ai répondu au colonel que j’irais. Willy, qui était un très bon ami à moi, ne pouvait pas me laisser partir seul, alors il s’est également proposé.», a expliqué Léo Major à l’auteur Hugh D. McVicar, pour un manuscrit qui n’a jamais été publié, mais dont Robert Fowler a recopié des passages dans la biographie de Léo Major qu’il a publiée dans la revue Canadian Military History.

À la tombée de la nuit, Léo Major et Wilfrid Arsenault partirent explorer Zwolle. Les deux soldats tombèrent rapidement sur un avant-poste allemand et, en voulant se cacher dans un fossé, Arsenault attira l’attention des Allemands, qui ouvrirent le feu et le tuèrent. Major élimina rapidement la menace avant de poursuivre sa mission, seul et armé seulement de deux pistolets mitrailleurs et d’un sac de grenades. «Je n’avais qu’une idée en tête: libérer la ville de Zwolle, peu importe ce qui m’attendait.»

Vers 1 h du matin, alors qu’il se trouvait près du centre de la ville, Major aperçut des soldats allemands endormis. Il s’empressa de les éliminer avant de capturer l’un d’entre eux et de le forcer à conduire un véhicule de reconnaissance de la Wehrmacht à travers les rues de la ville. Profitant de cette couverture et de la noirceur, Léo Major fit le plus de bruit possible en parcourant Zwolle, tirant sur les troupes qu’il croisait, lançant des grenades et agitant un drapeau blanc pour faire croire aux Allemands qu’il valait mieux s’enfuir que de combattre.

Libération

La stratégie porta fruit et, après quelques heures, les Allemands quittèrent la ville dans la confusion la plus complète, convaincus qu’une énorme force avait pris Zwolle d’assaut.

Par le fruit du hasard, Major rencontra ensuite Frits Kuiper, un habitant qui organisait clandestinement la résistance avec la population locale. Avec trois autres résistants, les deux hommes se rendirent à l’hôtel de ville pour annoncer la libération de la ville, information vite relayée par la radio locale.

Malgré cette bonne nouvelle, Léo Major savait toutefois que sa mission n’était pas terminée: il devait ramener le corps de son ami Wilfrid Arsenault auprès des siens. Avec l’aide des résistants, il récupéra la dépouille d’Arsenault avant de retourner vers les positions des Alliés. Dans un ultime acte de bravoure, il grimpa sur le toit de son véhicule pour affronter les balles que ses propres compagnons tiraient en sa direction et leur signifier qu’il ne représentait pas un danger.

Sa première Médaille de conduite distinguée lui fut remise pour souligner son courage et sa détermination à remplir sa mission à Zwolle.

Le Montréalais retourna au combat une deuxième fois lors de la guerre de Corée et obtint une seconde DCM pour avoir repoussé les Chinois des alentours de la stratégique colline 355 avec Léo Major décéda à Montréal le 12 octobre 2008 à l’âge de 87 ans.

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